Qui n’en a pas rêvé ? Quel auditeur un tant soit peu amateur de rap ne réclamait pas à corps et cris le premier album de Nakk ? D’ailleurs, le lyriciste de Boboch a beau nous dire que "ceci n’est pas (son) album" pour s’enlever un peu de pression tel un Guy Roux qui vise le maintien en début de championnat, l’attente suscitée par ce Street Minimum est proportionnel au temps d’accouchement de ce premier squeud en solo de l’ex-membre des Soldafadas. A croire que le mot "buzz" a était inventé pour ce genre d’événement. Mais si Nakk prend le temps de préciser que "Street Minimum" n’est pas à proprement parler un album, mais plutôt un street CD comme l’on dit dans ces circonstances, c’est d’abord parce que les 4 derniers titres sont des vieux titres qui ont forgé sa gloire et ensuite certainement parce qu’il n’a pas dû mettre tout le temps, l’attention et l’énergie nécessaire à l’élaboration d’un véritable album, qui devrait suivre (j’espère très très vite). Et cela se ressent essentiellement au niveau des instrus qui ne m’ont pas particulièrement comblé. Le plus bel exemple de ce léger raté est le remix tout bonnement indigeste de "Anges en air max". Largement orienté cainri au niveau des prods, Street Minimum contient de bonnes surprises dans ce domaine, comme sur "Dites leur" où le beat est bien mis en valeur par le flow tranchant de Salif. Mais, comme tout le monde le sait, lorsque l’on évoque Nakk on parle d’un MC qui peut prétendre au titre de meilleur rappeur grâce à son incroyable écriture. Et comme prévu, on n’est pas déçu par cet opus. L’attention et la profondeur apportées aux textes sont toujours aussi impressionnantes, Nakk ayant donné l’impression de se prendre la tête pour chacune de ses rimes. Cela nous donne donc des métaphores à foison, des lyrics bourrés de jeux de mots, de références, de double sens. Et des titres comme "Ils disent" ou "Chanson triste" rentre parfaitement dans le "Théorème de Nakk" dont la règle devrait être appris dès le collège : "Tout titre de Nakk Mendosa ne comportant pas de refrain est une tuerie". Car c’est dans ces moments que les textes ultras riches du MC de Bobigny sont dans la lumière et que les couplets pénètrent dans les oreilles de l’auditeur pour atteindre directement son cerveau, organe si souvent ignorés des rappeurs mainstream. Du coup, à la première écoute, on ne peut pas encore apprécié à sa juste mesure la qualité de chanson tels que "Négative attitude", ou "Du respect". Pour ce dernier, le fabuleux trio qui avait mis au monde un des meilleurs titres de l’histoire du rap français "On dit" sur ’Le Beat, le Flow et les Mots’ se retrouvent, et là encore, l’association avec les membres de Sakage Kronik et des 10’ est un franc succès, mélange savamment dosé de hardcore et de textes conscients. Autre invité, Brasco fait une apparition frustrante sur "Jour férié", se contentant de poser uniquement sur le refrain quand on connaît la puissance habituelle des couplets du MC d’Asnières !
Bref, plus on écoute Street Minimum, plus la légère déception initiale se dissipe. Et si un 8/10 est un mirage inaccessible pour certains, il ne constitue qu’une base pour Nakk qui ne va certainement pas s’en contenter.