1995. A cette époque, Internet n’était pas encore développé, l’équipe de France d’Aimé Jacquet n’était pas encore Championne du Monde (à des années-lumière même) et Jacques Chirac allait être élu Président mais pas avec 82% (à des années-lumière même). Mais là n’est pas le sujet, nous allons plutôt nous concentrer sur le 1er album solo d’Akhenaton, l’excellent "Métèque et Mat". Cette solitaire apparition discographique du chanteur d’IAM n’est pas dû à une quelconque embrouille avec son collègue Shurik’n, loin de là, mais plutôt à un besoin de se retrouver seul pour évoquer des sujets personnels qui touchent presque à l’intimé de son auteur. En effet, on sent dans cet album une totale implication et un certain don de soi de la part d’Akhenaton qui a donné beaucoup de sa personne pour écrire cette LP très profond et touchant. Akh met ici au grand jour sont talent d’écriture mais aussi de narrateur, les histoires qu’ils débitent derrière le micro étant captivantes, teintés d’un réalisme historique et social qui font adhérer immédiatement l’auditeur. "Métèque et mat" est très fortement influencé par les origines méditerranéennes de Tchill, ses racines naturelles, la Sicile, et adoptives, l’Islam et l’Orient. Ces différentes cultures sont omniprésentes tout au long de l’album mais plus particulièrement sur des morceaux comme "L’Américano","la Cosca", véritable fresque historique des pérégrinations des immigrants italiens, ou "Dirigé vers l’Est". Outre la diversité des cultures, cet LP propose aussi une diversité des thèmes abordés. En plus des chansons relatives à ses différentes origines, on retrouve bien sûr des morceaux à dominante sociale, mais pas uniquement. J’ai ainsi pu constater que je n’étais pas le seul à avoir une dent contre ces maudits fonctionnaires, Akhenaton voulant carrément "Eclater un type des assedics". Moi je me contenterai de "foutre des feintes aux contrôleurs" comme dirait d’autres, m’enfin bon, on compte plus les corps de fonctionnaire à blâmer. Chose assez inhabituelle pour un rappeur, il manie avec finesse l’autodérision dans "Je suis peut-être...". Cette autodérision est souvent la marque d’une certaine maturité, surtout dans ce milieu où il est bon ton de se prendre pour un bonhomme et le plus fort. De toute façon, moi je dis ça mais bon, je ne suis qu’un sale petit con orgueilleux, moche, hirsute, écervelé, sans humour et s’apparentant à une grosse merde. Mention spéciale aussi à "Face B", hymne au rap underground, véritable catalyseur du hip-hop français, même si Akh n’en fait pas vraiment partie avec ses milliers, voir ses millions, de disques vendus. En conclusion, "Métèque et Mat" est un album très abouti dont les chansons sont d’un excellent niveau et par conséquent c’est un classique à mettre entre toutes les oreilles, initiées ou non.